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Gustave Flaubert et les réseaux sociaux

Gustave Flaubert et les réseaux sociaux

Author : Maître Yann BOISADAM
Published on : 27/01/2025 27 January Jan 01 2025

Bouvard et Pécuchet est un roman inachevé de Gustave Flaubert publié en 1881 à titre posthume, dont les personnages éponymes ont été merveilleusement interprétés par Jean-Pierre Marielle et Jean Carmet dans un téléfilm de 1989 (réalisé par Jean-Daniel Verhaeghe et scénarisé par Jean-Claude Carrière).

Bouvard et Pécuchet, tous deux copistes, se rencontrent par hasard, un dimanche, à Paris, sur un banc public.

A la faveur d’un héritage, ils achètent une ferme en Normandie pour s’y installer définitivement.

« Remplis d’un enthousiasme de néophytes et sans autre préparation que la lecture d’ouvrages de vulgarisation et des conseils pratiques glanés [ici et là], ils se lancent successivement dans toutes les disciplines : agriculture, sciences, archéologie, littérature, politique (…), philosophie, religion, éducation, etc. » [1].

Ces initiatives vont toutes s’avérer désastreuses, Bouvard et Pécuchet exprimant finalement des opinions ne s’appuyant que sur des poncifs, des aphorismes et des clichés sur la société.

Le roman s’interrompt à son chapitre dix sur l’échec (encore un) de Bouvard et Pécuchet à assurer l’éducation de deux orphelins qu’ils ont recueillis.

L’œuvre dénonce (en autres) la vanité de ses deux héros qui pensent tout savoir, tout comprendre et pouvoir tout connaître et tout maîtriser.

Or, « nos deux « bonhommes » s’avèrent moins des opérateurs de savoir que des « copieurs de codes » [68]. Pour eux, savoir, c’est avant tout de prendre la pose ou l’habit (…). » [2]

N’est-ce pas ce qui caractériserait souvent les réseaux sociaux ?

Un lieu d’apparence … qui pourrait alors confiner au vide et qui rendrait le roman de Gustave Flaubert résolument moderne ?

Les réseaux sociaux ne seraient-ils pas un « dictionnaire des idées reçues », ceux qui l’animent réalisant ainsi « malgré eux un chef d’œuvre dont ils sont à la fois les victimes et les auteurs. » [3] ?

A la fin du téléfilm, Bouvard et Pécuchet, de guerre lasse, décident de se remettre à copier ... les bêtises qu’ils ont entendues et surtout celles qu’ils ont dites, jugeant cette entreprise comme « grandiose » et « très utile ».

N’avons-nous pas ici un autre prisme de lecture des réseaux sociaux ?


[1] BNF, Les Essentiels

[2] CAIRN.INFO / SCIENCE HUMAINES & SOCIALES / Bouvard et Pécuchet ou l’impuissance à problématiser

[3] Jean-Pierre BOURDON, Trois leçons sur Bouvard et Pécuchet de Flaubert


Article rédigé par Maître Yann BOISADAM, Avocat Associé

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