Prime d’arrivée : nouvelle technique de recrutement ?
Author : Maître Audrey NIGON
Published on :
01/06/2023
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2023
Peu usitée en France et initialement réservée à des postes de dirigeant, la pratique des primes d’arrivée (ou « golden hello ») tend à se répandre dans un contexte croissant de pénuries de candidats.
Le montant de cette prime, versée au moment de l’embauche, oscille entre 2 et 3 mois de salaire brut et peut parfois atteindre des montants beaucoup plus importants pour des profils très recherchés ou dans des secteurs d’activités spécifiques.
Cette prime d’arrivée peut avoir un effet attractif et ainsi convaincre les candidats de rejoindre l’entreprise. Cependant, le versement d’un tel avantage n’a de réelle utilité pour l’entreprise que si le salarié s’engage, en contrepartie, à rester dans l’entreprise pendant une certaine durée.
On peut toutefois s’interroger sur l’intérêt de ce type de clause à l’heure où l’argent ne semble plus être le critère phare d’attractivité.
Les jeunes générations pourraient ne pas se satisfaire de cette condition de présence, attachée à la prime d’arrivée, qu’ils pourraient assimiler à une « privation de liberté ».
Cette clause peut aussi provoquer certaines crispations en interne de collaborateurs, pourtant fidèles et engagés, qui peuvent s’émouvoir du montant de la prime et ainsi générer du turn-over, ce qui est particulièrement le cas dans un marché de l’emploi dynamique.
Elle peut parfois ne pas avoir l’effet escompté sur les candidats car cette prime n’est que temporaire et ne permet pas de fidéliser le salarié à l’entreprise ou de renforcer son attachement.
L’intérêt de cette clause va ainsi dépendre du profil recherché et du contexte. Il est évident qu’elle ne constitue qu’un outil de recrutement parmi d’autres dans une démarche plus globale d’attractivité et de fidélisation des salariés.
→ Dans un arrêt du 11 mai 2023, la Cour de cassation a été amenée à se prononcer, pour la première fois, sur la prime d’arrivée et plus spécifiquement sur la licéité des stipulations, insérées dans le contrat de travail, prévoyant le remboursement de cette prime en cas de démission intervenant dans un certain délai.
En l’espèce, il s’agissait d’un salarié trader dont le contrat de travail prévoyait le versement, dans les 30 jours de son entrée en fonction, d’une prime de 150 000 euros, à rembourser partiellement en cas de démission dans les 3 ans de sa prise de fonction.
Ce salarié a démissionné avant l’expiration de ce délai de 3 ans, de sorte que son employeur a exigé le remboursement partiel de la prime d’arrivée.
L’employeur obtient gain de cause par-devant le Conseil de prud’hommes mais la clause est invalidée par la Cour d’appel au motif que le remboursement partiel d’une prime de bienvenue portait atteinte à la liberté de travail et avait pour effet de fixer un « coût à la démission ».
La Cour de cassation casse cette décision et admet la licéité de cette clause dans ces termes (Cass. Soc. 11 mai 2023 n°21-25.136) :
Il résulte de ces textes qu'une clause convenue entre les parties, dont l'objet est de fidéliser le salarié dont l'employeur souhaite s'assurer la collaboration dans la durée, peut, sans porter une atteinte injustifiée et disproportionnée à la liberté du travail, subordonner l'acquisition de l'intégralité d'une prime d'arrivée, indépendante de la rémunération de l'activité du salarié, à une condition de présence de ce dernier dans l'entreprise pendant une certaine durée après son versement et prévoir le remboursement de la prime au prorata du temps que le salarié, en raison de sa démission, n'aura pas passé dans l'entreprise avant l'échéance prévue.
Ainsi, l’employeur peut conditionner l’acquisition définitive d’une prime d’arrivée, versée au moment de l’embauche, à une condition de présence pendant une certaine durée et prévoir un remboursement partiel, au prorata du temps qui n’aura pas été passé dans l’entreprise, en cas de démission avant l’échéance prévue.
Pour que cette clause soit licite, l’avantage doit être distinct de la rémunération versée au salarié au titre de son activité, avoir pour objet de fidéliser le salarié pendant une durée déterminée et le remboursement doit dépendre de la durée non accomplie par le salarié.
La rédaction de la clause doit donc être précise pour assurer sa licéité.
N’hésitez pas à contacter le cabinet pour la rédaction de cette clause et, le cas échéant, pour sa mise en œuvre.
Article rédigé par Maître Audrey NIGON, Avocat Associé
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