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Arrêt du Conseil d’Etat du 18 décembre 2024 sur la présomption de démission : l’appréciation « in concreto », toujours plus loin..

Arrêt du Conseil d’Etat du 18 décembre 2024 sur la présomption de démission : l’appréciation « in concreto », toujours plus loin..

Published on : 09/01/2025 09 January Jan 01 2025

Le décret du 17 avril 2023 sur la mise en œuvre de la présomption de démission instituée par l’article L1237-1-1 du Code du travail vient d’être validé par le Conseil d’Etat, saisi par six syndicats sur divers fondements, d’inégal intérêt.  L’essentiel d’entre eux tenait, à la violation de la convention 158 de l’OIT sur le licenciement et à la discrimination alléguée en raison du choix ouvert à l’employeur entre la présomption de démission et le licenciement.

Le Conseil d’Etat rejette l’ensemble des recours mais instille, au détour de son 7° considérant, une condition qui n’existe ni dans la loi ni dans le texte réglementaire, à savoir que : « pour que la démission du salarié puisse être présumée […], ce dernier doit nécessairement être informé, lors de la mise en demeure, des conséquences pouvant résulter de l'absence de reprise du travail sauf motif légitime justifiant son absence ».

Avant les textes précités, le salarié qui ne se présentait pas à son poste sans motif légitime se voyait déjà mis en demeure de le reprendre, sauf à justifier de son absence. Et, à défaut, la jurisprudence admettait assez volontiers la faute grave sans se préoccuper de savoir si le salarié avait été prévenu d’une telle issue ; manière de reconnaître sa responsabilité dans la rupture du contrat, puisque par hypothèse ici, il se sait en contravention avec ses obligations contractuelles. La qualification de l’absence du salarié est en effet binaire : soit justifiée et par essence non sanctionnable, soit injustifiée et par définition fautive (la cause réelle et sérieuse de licenciement s’assimilant ici à une « faute » simple).

Le Conseil d’Etat reconnaît d’ailleurs dans son 4°considérant cette responsabilité en refusant de suivre les demandeurs sur le terrain de la violation des règles du licenciement au motif que « la présomption de démission […] n'étant constituée que lorsque le salarié a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste […], la cessation de la relation de travail susceptible d'en découler n'est pas à l'initiative de l'employeur ». Et ne lui est pas imputable, est-on tenté d’ajouter pour tirer à son terme le fil du raisonnement.

L’article L1237-1-1, précité, caractérise légalement pour la première fois l’absence d’«équivoque » dans la volonté du salarié de rompre son contrat : si celui-ci a volontairement abandonné son poste et ne l’a pas repris après une mise en demeure de le faire ou d’en justifier, il est raisonnable de considérer qu’une telle volonté est effectivement dépourvue d’ambiguïté.
Pourquoi alors faire dépendre de l’information au salarié la qualification de la rupture, dont le juge lui-même estime qu’elle s’impose à lui, au terme de ses constats factuels ?
Car c’est ce que dit cet arrêt : l’omission de l’employeur, non de mise en demeure mais d’information des conséquences, permettra au salarié de revendiquer le bénéfice d’un licenciement donc le droit à des allocations de chômage, dont soudain il importe peu que l’article L5422-1 les réserve aux salariés « dont la privation d'emploi est involontaire ».

Et ce, dans le meilleur des cas, celui où l’envoi des documents de rupture s’accompagnera d’une référence à l’abandon de poste, donnant ainsi un motif à la rupture ; à défaut, le salarié pourra aussi plaider l’absence de cause réelle et sérieuse, et obtenir quelques mois de salaires de dommages et intérêts.
Rappelons la teneur absconse de l’appréciation « in concreto » développée depuis quelque temps par la Chambre sociale de la Cour de cassation : telle règle de droit (dont la clarté n’est pas dans le débat), appliquée à un cas particulier, serait « injuste », il est alors permis au juge de l’écarter.
L’arrêt du Conseil d’Etat va encore plus loin en érigeant en principe général l’appréciation «in concreto » : la Loi est injuste, ignorons-la.

Ou comment Calimero a eu raison de l’adage « Dura Lex, sed Lex ».
 

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