Coupe du monde de football : les règles du jeu
Published on :
21/11/2022
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2022
Ça y est c’est parti !
La 22ème édition de la Coupe du monde de football a débuté le 20 novembre 2022.
Une frange de la population mondiale la boycottera.
La faute, qu’on ne saurait contester, aux circonstances troubles de l’attribution de la compétition au Qatar, aux conditions de travail des travailleurs étrangers recrutés pour construire les stades et les infrastructures et à une gabegie climatique.
Très bien, mais l’on doit aussi objectivement observer que :
- la désignation le 2 décembre 2010 du Qatar comme pays organisateur n’avait à l’époque pas provoqué la levée de bouclier, fût-elle justifiée, qu’on a connue en 2022 à l’approche de la compétition ;
- et pour reprendre un des bons mots d’Albert Camus sur le football, « il n’y a pas d’endroit dans le monde où l’homme est plus heureux que dans un stade de football ».
Mais les horaires des matchs (11 heures, 14 heures, 17 heures et 20 heures), empiétant sur les heures de travail, risquent de compliquer les choses.
L’occasion de rappeler quelques règles, non pas du jeu de football – même si l’on pourrait parler des heures de celle du hors-jeu -, mais de … droit social.
1°/ Lorsqu’on se trouve au travail, c’est pour travailler.
Certes, il n’est pas interdit d’utiliser son matériel informatique professionnel ou personnel pour vaquer à une occupation personnelle, cependant à condition que cette vacation soit justifiée, ponctuelle et non abusive.
A défaut, l’employeur, qui le rémunère, pourra rappeler le salarié à ses obligations : c’est une stricte application du synallagmatisme contractuel.
2°/ Le footeux supportera difficilement que ses obligations professionnelles l’empêchent de supporter son équipe nationale et de suivre des matchs des autres sélections nationales.
La Coupe du monde de football est un extraordinaire moment d’émulations nationales et internationales.
En ces temps troublés, elle tombe à point nommé.
Footballistiquement, la Coupe du monde de football est surtout un laboratoire permettant d’apprécier les grandes évolutions du jeu de football, d’ailleurs souvent corrélées aux caractéristiques des nations concurrentes, ainsi la « grinta » des sélections sud-américaines.
Pour le footeux ne pouvant composer via le télétravail, point de salut, il doit poser des congés payés.
Le droit du travail veut cependant que la date de départ en congés payés, sauf convention ou accord collectif de travail, soit fixée par l’employeur.
Et de ce point de vue, les choses seront pratiquement compliquées.
Un grand nombre de PME, lesquelles constituent la majorité des employeurs, ferme à la faveur des fêtes de fin d’année, fixant de fait les congés payés des salariés.
Et l’employeur attend, dès lors normalement, que le temps préalable à la période de fermeture soit bien travaillé, pour finir l’année et préparer la suivante.
Cette année, la Coupe du monde se déroule exceptionnellement du 20 novembre au 18 décembre : l’on voit bien la difficulté.
Et si le salarié footeux tente d’imposer à son employeur ses propres dates de congés payés corrélées au Mondial de foot, sans respecter la fixation patronale, il s’exposera à une sanction disciplinaire.
3°/ Reste le footeux compulsif.
Lui ne perdra pas une miette des 64 matchs de la Coupe du monde 2022.
Et pour reprendre une expression assez drôle, il pourra aller, même non malade, jusqu’à « se mettre en maladie », à la faveur d’un arrêt de travail pouvant être délivré au terme d’une téléconsultation donnée par un médecin exerçant à l’autre bout de la France.
L’on réprouve à le concéder, mais le footeux compulsif sera ce faisant, en droit du travail, protégé contre une sanction disciplinaire.
L’arrêt de travail médicalement justifié provoque en effet la suspension du contrat de travail.
Et il est loisible au salarié, pendant la suspension du contrat de travail, d’exercer une activité de loisir, précisément car le contrat est suspendu.
Le seul droit pour l’employeur sera de faire pratiquer une contre-visite médicale entrainant, si la contre-visite médicale ne peut être pratiquée en raison de l’absence du salarié à son domicile ou si elle conclut à un arrêt de travail non médicalement justifié, l’interruption du complément patronal complétant les indemnités journalières de sécurité sociale.
En droit du travail, il n’y aura toutefois pas matière à procéder disciplinairement.
Pour autant, le footeux compulsif ainsi placé en arrêt de travail prendra un risque sur le terrain du droit de la sécurité sociale.
Si c’est non l’employeur mais la caisse primaire d’assurance maladie qui diligente une visite de contrôle, concluant à un arrêt de travail non médicalement justifié, les indemnités journalières de sécurité sociale, et corrélativement le complément patronal de salaire, seront interrompus.
Sans préjudice de sanctions plus lourdes en cas de collusion avec le médecin traitant ayant délivré l’arrêt de travail.
Et quoi qu’il en soit, il en restera toujours quelque chose dans la relation quotidienne de travail, lorsque le footeux compulsif reprendra son poste.
Bref, compulsivité footballistique et droit du travail ne font pas forcément meilleur ménage.
4°/ Le plus sage, sans doute, sera dans la mesure du possible de mettre en place dans l’entreprise les moyens permettant aux salariés de suivre au temps et sur le lieu du travail, ceux des matchs qui ne peuvent être ratés, en préservant au mieux la tâche de travail.
Le CSE sera à cet égard le bon relais et si l’employeur, qui peut lui-même être footeux, voire footeux compulsif, s’y prend bien, il provoquera l’adhésion pour longtemps.
On ne peut pas in fine déposer le stylo sans formuler un pronostic.
Sur le papier, le Brésil a une « Seleção » du tonnerre.
L’Argentine est emmenée par un Messi qui mérite sa Coupe du Monde.
Et une bonne moitié des sélections européennes sont de sérieuses candidates à la victoire finale.
L’équipe de France, pas rassurante lors de ses dernières sorties, déplore des blessés, en dernier lieu son Gone Ballon d’Or.
On peut penser que ce coup du sort conduira l’équipe de France à évoluer en mode « catenaccio », que son sélectionneur connait bien – il a ainsi gagné en 1998 et 2018 -.
Elle sera alors compliquée à jouer : allez les Bleus !
Christophe BIDAL
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